Je t’aime, moi non plus

Les utilisateurs méritent toujours d’avoir le contrôle du programme qu’ils utilisent, individuellement et collectivement.
Le logiciel « privateur » (…) impose un système de colonisation numérique.

(Richard Stallman : « Avec Hadopi, la France n’est pas un pays libre »)

Stallman me pose un problème, et ça fait des années que ça dure. Il peut se révéler un troll de la pire espèce quand il se lâche, franchement odieux. Mais c’est aussi une des personnes dont j’apprécie les raisonnements et l’intelligence.

Cela dit c’est quand même un sacré troll de compétition. Et il est souvent difficile de le suivre au bout de sa logique. Ainsi, je ne peux pas me résigner à voir, comme lui, une “prison” ou un “colonialisme” dans l’acte de choisir un outil plutôt qu’un autre. Je ne suis pas prisonnier de mon iPad, pas plus que je ne m’emprisonne en utilisant un crayon ou un stylo-plume, plutôt qu’un bout de charbon de bois que j’aurai préparé moi-même.

Par contre, je suis persuadé de l’importance qu’il y a comprendre nos outils. Je refuse que la simplicité (qui est un excellent objectif) se fasse au détriment de la maitrise et de la compréhension. L’utilisateur devrait avoir le choix de pouvoir regarder sous le capot. Pour comprendre.

Sans compréhension, la technologie se muerait rapidement en magie, et les ingénieurs en sorciers tous puissants.

La simplicité de l’iPad et de l’iPhone est tout en surface, en dessous se cache une complexité incroyable, une somme d’intelligence et d’innovations qu’on n’imagine même pas. Et cette complexité a un coût… phénoménal. Qui pourrait, aujourd’hui, créer sa boîte informatique dans un garage comme Apple, en son temps, a été créée par les deux Steve ? Personne. Il faut des budgets de multinationales pour espérer rassembler les talents nécessaires et pour fabriquer le prochain iPhone ou iPad.

Vous me direz que l’innovation, pour nous, change simplement de terrain. De l’outil lui-même — le hardware, le PC ou le Mac que l’on bricolait et bidouillait — elle passe à ce que l’on en fait : le développement d’applications et leur utilisation. C’est pas plus mal, d’ailleurs : j’écris avec mon crayon, je ne le fabrique pas moi-même. Pas de raison que ce soit différent avec un ordinateur.

Mais je suis toujours capable de fabriquer un crayon rudimentaire, si besoin est. Ou de le réparer, si je le casse. Ce n’est pas le cas avec l’iPhone ou l’iPad. Et je constate avec une certaine frustration (qui motive ce billet) que ce n’est déjà plus le cas avec mon MacBook Air, qui est tombé en panne (ou que j’ai cassé, je ne sais pas trop ce qui s’est passé) il y a quelques jours de ça : je ne peux pas l’ouvrir pour espérer le réparer, car Apple utilise des vis spéciales… Je suis obligé de demander l’aide de Apple, ou d’en racheter un neuf.

Apple n’a jamais aimé que l’utilisateur démonte ses machines, ça n’est pas nouveau. Mais jusqu’à présent elle n’avait jamais eu les moyens de m’en empêcher efficacement. Les vis du MacBook Air et, surtout, l’iPad et l’iPhone me disent que les temps ont changé (à lire en sifflotant Dylan, bien entendu).

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Il va falloir que j’achète une nouvelle boite de tournevis…

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