Cette affiche, placardée dans le hall d’entrée de mon immeuble, n’a l’air de rien et pourtant elle est terriblement décevante.
Au premier abord, on se dit que c’est une bonne chose d’entretenir ces conduits, malgré le fait que le produit utilisé dégage une odeur pestilentielle qui mettra des heures à disparaître (je le sais, ils font ça deux fois par an), et malgré le fait que je rêve d’un monde ou, au moins, d’un immeuble sans vide-ordures: ma voisine du dessus passant ses soirées à faire claquer la porte du dit vide-ordures dans ce qui pourrait bien être la tentative la plus pitoyable de composition musicale. Pitoyable mais très sonore — bref.
Pourtant, si l’on y regarde de plus près, si par exemple on prend le temps de lire le petit texte en nota (pourquoi les parties véritablement intéressantes de ce genre de documents sont-elles toujours écrites en plus petit ?) , on se dit que cette affiche est un écho fidèle de la mentalité de notre époque, des valeurs fondamentales d’une société qui a élevé la mesquinerie au rang de règle de vie, une culture qui exprime l’essentiel de sa spiritualité et sa créativité dans l’alinéa ou la note de bas de page. Je cite:
Nota – Nous déclinons toute responsabilité des conséquences dues à des infiltrations d’eau lorsque les installations des vide-ordures présentent des anomalies: fissures, trous ou conduits éclatés, joints de vidoirs défectueux ou vidoir mal fermé.
Je peux comprendre les “vidoirs (…) mal fermés”, mais, et vous allez dire que je coupe les cheveux en quatre, comment sommes-nous supposé savoir si le “conduit” a des “fissures” ou s’il est “éclaté” ? Tout ce que, moi, je peux voir du vide-ordure c’est sa porte, grise et lourde et aussi vieille que l’immeuble qu’ils ont construit autour. J’ai pas trop l’envie (ni la place, avec mes grandes oreilles) d’y mettre la tête pour vérifier si un quelconque conduit est fissuré en amont ou éclaté en aval, ou inversement… N’est-ce pas le rôle de cette entreprise de vérifier ça, justement ?
Et même, le sachant, comment aurions-nous eu le temps de faire les travaux nécessaires pour éviter une “infiltration” entre le moment où cette affiche a été placardée (c’est-à-dire pas avant le vendredi 20, dans l’après-midi) et le jour des travaux (lundi 23, aujourd’hui) ?
Une charmante façon de dire “(je t’em)merde” à tout le monde.