Je réfléchis donc je suis…

Cet article, que j’ai trouvé via porkpop est aussi intéressant que… euh… naïf (sans que ce soit péjoratif). Il pourrait tenir en une question : quelle confiance avons-nous en nous-même ? Ou alors, faisons-nous jamais autre chose que mimer des comportements, des modèles ?

Forcément, si c’est naïf je m’y sens un peu chez moi ! D’ailleurs, ça m’a rappelé cette drôle d’époque où j’avais l’habitude d’arracher les préfaces des livres. Stupide, j’en conviens. Mais, à l’époque du moins, ça ne me semblait pas plus con que de nous imposer un guide nous gavant de ses explications sur le pourquoi du comment Proust a préféré tremper une madeleine plutôt que de s’en faire une, le même guide qui étale sa science capillicosécatrice jusque dans la Recherche elle-même, qui n’en demandait pas temps pour être belle, en la parsemant de notes de bas de page. Ou cet autre, dans un bouquin de peinture, qui nous parle de tout et de rien alors que nous voulons seulement dévorer, page après page, les toiles d’un Bacon, ou baver devant celles d’un Picasso.

J’arrachai aussi les reproductions de toiles, mais c’était pour les accrocher aux murs de ma chambre. Pas pour les jeter, pour (essayer de) les copier !

C’est à peu près le même sentiment navré que j’éprouvais déjà (et, à l’époque, c’était plus un sentiment de dégoût), écolier, envers la lecture à l’école. Ces effroyables « analyses de texte » qu’il fallait pondre en suivant le chemin — trop plat, et si morne — balisé par un professeur qui suivait lui-même à la trace les pistes de je ne sais quel ouvrage de « référence » à la couverture jaune et noir ou rouge et blanche, ou plus moche mais ça j’ai oublié.

Ces livres dont on m’imposait la lecture, qu’ils en ont soufferts ! Imposer la lecture c’est comme obliger de manger des épinards ou des endives quand on aime pas ça… Mauriac ou même Molière (l’endive et les épinards ?) auront attendu que je sois loin de l’école pour que je leur trouve de l’intérêt. Molière surtout, qui ne me quitte jamais longtemps.

Pourtant, un guide, que ce soit une préface, une étiquette sous un tableau ou un professeur ça peut-être autre chose qu’un ânonnement aussi pâle et fade que le papier dont ils sont faits. Pour être parfaitement honnête, je ne sais pas si j’aurais jamais aimé la lecture si un nouveau professeur n’était pas entré un jour en classe, en remplacement de l’autre qui était tombé malade. Nous étions sa première classe et ce fut ma première rencontre avec la littérature. Les 3 années qui ont suivi, dans ce qui est rapidement devenu sa classe, nous fûmes quelques uns à avoir été initiés à la littérature, à la langue et au rythme.

Il y avait toujours des lectures imposées, mais d’autres et, surtout, avec la promesse de pouvoir travailler dessus plus librement. L’essentiel était toujours d’attaquer le texte, de s’affronter aux idées de l’auteur. Pas de répéter une leçon.

Aujourd’hui je n’arrache plus les préfaces, j’ai veilli ? Parfois, je les lis… après le texte qu’elles accompagnent. Ca me permet de découvrir sans a priori à la fois l’œuvre que je voulais lire et, ensuite, le regard du préfacier.

J’ai vieilli ? En tous cas je me souviens avec le même enthousiasme de mon professeur de français. Je le revois passer le seuil de la classe, son petit cartable en cuir rapé, ses cheveux déjà gris —  pourtant jeune (sexy !) — et les yeux souriants. Sûr que c’était une langue vivante le français, et la littérature francophone un univers qu’on avait envie d’explorer, dans le cours de Monsieur Denis Leclerc.

D’accord, ça n’intéresse que moi…

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