Une laïcité moralisatrice et liberticide

Extrait d’une interview des juristes Stéphanie Hennette-Vauchez et Vincent Valentin qui décrivent une “nouvelle laïcité” moralisatrice et liberticide, en réfléchissant à l’affaire Baby-Loup. Il y a longtemps que je n’avais pas lu quelque chose d’aussi intelligent dans la presse sur cette question :

Au XXe siècle, le principe juridique de la laïcité garantissait une liberté : celle de croire ou de ne pas croire. Aujourd’hui, les partisans de la nouvelle laïcité veulent imposer des restrictions. Ils défendent non pas un droit mais une culture, une certaine manière d’être. On touche déjà à la manière de s’habiller, pourquoi pas bientôt à la manière de manger, ou autre ? On l’a bien vu avec la loi du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public [dite anti-burqa, ndlr]. Le gouvernement a retardé de six mois l’entrée en vigueur de sa loi pour préparer les citoyens à travers une campagne : «La République se vit à visage découvert.» Une sorte de catéchisme républicain.
(…)
L’affaire Baby-Loup est intéressante car elle révèle que le prisme espace privé-espace public ne permet plus de répondre de manière satisfaisante à ces questions. Bien souvent, des choix privés de l’individu demandent, pour avoir un sens, de trouver une forme de reconnaissance dans l’espace social. Par exemple, le changement de sexe : il n’y a pas plus intime, et pourtant, ça n’a aucun sens si l’Etat n’accepte pas de modifier l’état civil de la personne. Pourquoi ne pas réfléchir de la même manière au fait religieux ? Quel est l’espace de reconnaissance social de ce choix intime ? Ce qui est sûr, c’est que le principe de laïcité n’est pas le bon moyen juridique pour répondre à ces questions.

C’est à lire sur Libé : «La présence de la religion est désormais jugée insupportable»

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